Japon : La culture des esprits d’Angleterre et Japon
Japon : C’était du temps où je venais de former une alliance avec Angleterre. Moi, Japon, j’ai visité et me suis efforcé d’établir des relations amicales avec les contrées européennes.
Japon : Je suis allé chez Allemagne emprunter de l’huile, mais combien de temps cela m’a-t-il pris… Voilà que le soleil est déjà couché, et qu’il fait frisquet. Je ferais mieux de me dépêcher de rentrer et de préparer à diner. Ah ! Voilà quelqu’un à l’entrée…
Angleterre : Ah ! Salut, Japon.
Japon : Oh ! Angleterre, de quoi s’agit-il à pareille heure ?
Angleterre : Ah… Eh bien… Pas que je voulais te voir… Puisqu’on a été jusqu’à s’allier, et j’ai pensé… pas que j’ai profité de l’occasion pour jeter un œil à la culture japonais…
Japon : Vraiment ? J’ai l’honneur d’avoir fondé une alliance avec toi, je t’en prie, reste et goûte à la culture japonaise.
Angleterre : Ah, au fait ! La montagne par là-bas, c’est le mont Fuji ?
Japon : Non. C’est une montagne quelconque.
Angleterre : Que… J’avais le sentiment qu’y avait un truc étrange sur cette montagne, donc je croyais que c’était lui.
Japon : C’est le perchoir du tengu[1]. Par le passé, une créature appelée tengu apparaissait et nuisait aux habitants.
Angleterre : Donc c’est un mauvais bougre ?
Japon : Oui. C’est également un dieu de la montagne, ainsi ne peut-on dire que le tengu est un démon.
Angleterre : Tengu, hein ? Il me fait signe.
Japon (pensée) : Comment dois-je répondre à cela ?
Angleterre : Dis, Japon.
Japon : Oui ?
Angleterre : La voix de ce gosse tout à l’heure était assez casse-pieds.
Japon : Vr-vraiment ? Je suis désolé.
Japon (pensée) : Je vis seul pourtant…
Angleterre : Enfin il avait l’air de bien s’amuser !
Japon (pensée) : Peut-être un tel voyage l’a-t-il fatigué…
Japon : Angleterre, il me semble que tu ferais mieux de prendre ton bain en premier.
Angleterre : Ah… ah bon ?
*Ambiance bain japonais*
Angleterre : Hum… Japon agissait bizarrement tout à l’heure… Différences culturelles peut-être ? Ou bien est-ce que j’ai fait quelque chose de bizarre ?
Kappa[2] 1 : Ola que voilà un gentilhomme !
Kappa 2 : Nos excuses, nous partons de ce pas !
Angleterre : Non, ça me dérange pas que vous restiez.
Angleterre (pensée) : Mais qui sont-ils ?
Kappa 1 : Merci bien, messire ! Ah, que nous ne sommes-nous présentés ! Nous sommes des kappa. Je vis au Japon depuis fort longtemps.
Kappa 2 : Messire ! Puis-je vous laver le dos ?
Angleterre : Ah, non, non, ça va aller. Kappa ? Ah, on vient à peine de se rencontrer mais j’aurais aimé que tu m’expliques la culture japonaise en détails. Je viens de contracter une alliance avec lui, mais j’y connais pas grand-chose…
Kappa 1 : Mais volontiers ! Nul autre que nous ne connait mieux la culture japonaise !
Angleterre : Merci beaucoup.
Kappa 2 : D’abord, voici une coupe.
Kappa 1 : C’est une liqueur de riz appelée saké. Ola, arrêtez, arrêtez. La coupe entière !
Angleterre : … Ah ! C’est bon !
Kappa 2 : Vous avez bon goût, messire !
Kappa 1 : Messire ! Avez-vous mangé des sushis ?
Angleterre : Ah… c’est le poisson cru sur du riz ?
Kappa 1 : Ah, voilà bien ce que les étrangers imaginent, n’est-ce pas ? C’est une création récente. C’est chose de la période Edo[3], confectionnée par une personne du nom de Hanaya Yohei.
Angleterre : J’en savais rien…
Kappa 1 : Le poisson de Kanazawa et le poisson-globe d’Akan sont encore très à la mode !
Angleterre : Est-ce que le poisson est différent en fonction de sa localisation ? J’aimerais bien en goûter.
Kappa 1 : Mais… il est devenu difficile de vivre dans ce monde…
Angleterre : Je comprends ! Je comprends tellement ! Ils décident de faire monnaie unique, le cours des actions est jamais stable…
Kappa 2 : Messire, voudriez-vous une autre coupe de cette liqueur ?
Angleterre : Ah… à quoi ressemblait Japon par le passé ?
Kappa 1 : Eh bien, Japon a été mis à l’écart des autres contrées, nous n’avions donc plus accès à ce que nous avions auparavant, c’était dur…
Angleterre : Ça me rappelle chez moi…
Kappa 1 : Ce temps s’est prolongé pendant une centaine d’années, sous le contrôle des Tokugawa[4], mais c’était bien tranquille.
Angleterre : Moi aussi, un coup le roi venait de chez Ecosse, un coup il venait de chez Allemagne… tant de choses se sont passées.
Kappa 1 : Vous aussi avez été en difficulté, messire, n’est-ce pas ? Allons donc, une autre coupe !
Angleterre : Stop, stop. Merci.
Kappa 2 : Mais de rien.
*Ambiance de salle à manger*
Japon : Angleterre est en retard. J’ai entendu dire que par là-bas on n’a pas pour habitude de rester longtemps. Peut-être la chaleur lui a-t-elle donné le vertige ? Ce serait terrible s’il s’était évanoui. Devrais-je aller jeter un œil ?
*Angleterre arrive*
Angleterre : J’ai fini. Quel bon bain c’était.
Japon : Cela t’aura pris longtemps. Le diner est prêt.
Angleterre : Oh, désolé, je causais avec les types qui étaient déjà dedans. C’était bien sympa. Ils étaient cools.
Japon : Ah… vraiment ?
Japon (pensée) : Mais je vis seul…
Angleterre : Ouais. Ils m’ont donné une sorte d’élixir… Regarde ça.
*Il montre la bouteille à Japon*
Japon : Mais c’est… l’élixir miraculeux des kappa !
Angleterre : Ah ouais ? Euh… Japon ?
Japon : Ah ! Ah… comment as-tu… ah… non… mais… ah… euh… euh…
Angleterre (pensée) : J’ai encore fait quelque chose de bizarre ? C’est difficile, la culture japonaise…
Angleterre : En tout cas, tu m’offres un diner de roi.
Japon : C’est de l’ordre de l’ordinaire.
Angleterre : Ah… ah bon ?
*Japon verse le thé*
Japon : Ton thé, et voici une serviette. C’est chaud, sois prudent.
Angleterre : Oh, qu’il est bon ! Bon, je commence…
Japon : Oui, je t’en prie, régale-toi.
Angleterre : C’est trop bon ! Comment ça s’appelle ?
Japon : Ah, il s’agit d’un nikujaga. J’ai tenté de recréer ton ragoût de bœuf mais cela ne s’est pas avéré être une grande réussite…
Angleterre : Allons, allons… Failures teaches success[5], qu’ils disent… donc pas de souci, pas vrai ?
Japon : Eh bien… grâce à toi, cela fait désormais partie de la gastronomie japonaise.
Angleterre : Euh… c’est quoi ce truc marron ?
Japon : C’est ce que l’on nomme koyadofu, cela s’apparente à du tofu dur préparé à partir du soja.
*Angleterre pique le koyadofu*
Angleterre : Ah ! Un truc blanc en est sorti.
Japon : Le koyadofu est un plat conçu par les moines résidant au mont Koya durant la période de Kamakura[6]. Sous le règne des Tokugawa, on le nommait également koridofu. A l’ère Meiji[7], réfrigéré artificiellement le tofu était possible et s’est donc fait une place sur la table de tout à chacun aussi. Par habitude, on le replonge dans l’eau, puis le dépose dans la soupe pour sa saveur.
Angleterre : Je vois. Hum… C’est bon !
*On secoue des panneaux*
Japon : Ah ? N’y a-t-il pas eu un bruit à l’instant ?
Angleterre : Ce doit être eux qui sortent du bain, non ?
Japon (pensée) : Je vis seul pourtant… eux ?
*On secoue des panneaux plus vigoureusement*
Japon : Ce n’était… pas le bruit du vent pour sûr…
*Quelque chose s’écroule*
Angleterre : Y a du bruit qui vient de l’entrée !
Japon : Qu’y a-t-il ?!
Amérique : Hello ! Eh, Japon, je suis venu m’amuser !
Japon : A… Amérique ?
Angleterre : Amérique ! Qu’est-ce que tu fous là ? Et pourquoi t’as défoncé l’entrée ?
Amérique : Ah ah ah ah ! Eh ben, je suis venu en avion, et chez Japon, c’est un peu étroit, tu sais ? J’ai pas eu assez de place pour me poser, donc j’ai un chouïa relevé le défi et voilà, ça s’est fini comme ça
Angleterre : D’où que c’est un chouïa, d’où ?
Japon : Amérique, je te prie de déplacer ton avion ailleurs. Que dirais-tu de diner avec nous ?
Angleterre : Mais oh, Japon, pourquoi t’es aussi serein ?
Japon : Amérique a toujours été aussi énergique.
*Il part chercher le diner*
Angleterre (pensée) : Il y est habitué.
Amérique : Ouais, Japon est toujours super calme !
Angleterre : Toi alors… tu viens toujours l’embêter, avoue ! Japon aussi a beaucoup de problèmes, tu sais ?
Amérique : Ah ouais, Angleterre ? Alors pourquoi t’es là ?
Angleterre : J’ai formé une alliance avec Japon !
Amérique : Sérieux ?
*Japon revient et dépose les plats*
Japon : Désolé de vous avoir fait attendre.
Amérique : Wouah mais c’est du luxe, ce diner, Japon !
Japon : C’est de l’ordre de l’ordinaire pourtant…
Amérique : Ok, bon appétit !
*Il enfourne tout à vitesse grand V*
Amérique : Oh, Amérique ! Si tu continues de te goinfrer comme ça, tu grossiras même si c’est de la nourriture japonaise !
Amérique : Pas de problème ! Si ça devait arriver, un petit entraînement au camp, et c’est réglé !
Angleterre : Que… Tu fais toujours tout un ramdam ! Tu bâfres toujours d’énormes pots de glace juste après de toute façon.
*Amérique parle la bouche pleine*
Angleterre : Quoi ? Sous-estime pas mon thé noir !
Amérique : Le thé noir, c’est pas de la bouffe !
Japon : Allons, allons… il existe bien des manières de savourer un repas.
Amérique : Dis, Japon ! Tu me donnerais de tes plats diététiques ?
Angleterre : T’as qu’à manger du natto[8].
Japon : Il y a aussi le daikon[9] râpé, mais je vous en prie, Angleterre, Amérique, ne vous battez pas et mangez de tout.
Japon : Au final, tout le monde dort chez moi cette nuit.
*Ambiance nocturne*
*On frappe à la porte d’Angleterre*
Angleterre : Hum… Hum…
Kappa 1 : Messire… Messire !
Angleterre : Hum… qui est là ?
Kappa 1 : C’est moi, messire !
Angleterre : Oh, t’es le kappa qui était dans le bain tout à l’heure ?
Kappa 1 : Lui-même. Merci beaucoup pour tout à l’heure !
Angleterre : Je me suis bien amusé aujourd’hui. On aura qu’à prendre un bain ensemble demain encore.
Kappa 1 : J’aimerais bien… Nous ne serons point là demain. Nous sommes en partance pour la montagne profonde.
Angleterre : Ah bon ?
Kappa 1 : Eh oui, c’était notre dernier ban aujourd’hui. Nous adorons en prendre, c’est pourquoi nous en avons pris un dernier.
Angleterre : Vous…
Kappa 1 : Par le passé, on nous disait terrifiants, mais les habitants croyaient alors en nous. Maintenant, les temps ont changé et peut-être bien que notre existence s’apprête à devenir légende.
Angleterre : A ce point ?
Kappa 1 : J’avais même l’habitude de converser avec Japon par le passé. Mais maintenant que le monde a changé…
Angleterre : Ah bon…
Kappa 1 : Ah, au fait ! Cette sauce au concombre, veuillez la transmettre à Japon.
Angleterre : D’accord, je la lui passerai.
Kappa 1 : Eh bien, c’était ma dernière fois ici, mais vous rencontrer, messire, m’a rendu bien heureux.
Angleterre : Dis, tu vas pas te sentir seul ? Tu… tu peux pas rester encore un peu ?
Kappa 1 : Ah, non, mon temps est écoulé ici. Mais papoter avec vous a été un plaisir.
Angleterre : Ok, je vois… on se refera un bain un de ces quatre.
Kappa 1 : Oui, volontiers. Au revoir, messire !
*Le kappa s’éloigne*
Angleterre : Porte-toi bien.
Zashiki[10] : Au revoir !
Angleterre : Hein ? Cette voix… Toi ?
Zashiki : Je suis une zashiki warashi.
*Elle rit*
Angleterre : C’était donc toi qui faisais tout ce boucan !
Japon : Angleterre, où es-tu donc…
*Angleterre passe au loin*
Angleterre : Attends, eh, oh, stop !
Japon : An… Angleterre ? Je vis seul… que diable… Avec qui donc…
*Amérique le rejoint*
Amérique : Ah, Angleterre a encore ses hallucinations ? C’est pas la première fois que tu voit ça ?
Japon : Oui.
Angleterre : Bordel, t’es qu’une gosse mais tu cours vite… Mais attends…
*Il poursuit la zashiki warashi qui continue de rire.*
*Bruit de verre brisé*
Amérique : Japon, c’est pas bien si tu prends pas soin des gosses…
*Il baille*
Amérique : Bonne nuit…
Japon : Mais je vis seul…
*La zashiki warashi rit*
Zashiki : Au revoir !
[1] Créature du folklore japonais, hybride d’humain et de rapace.
[2] Créature aquatique du folklore japonais apparaissant sous les traits d’une tortue antropomorphe
[3] 1600-1868
[4] Famille régnante durant la période Edo, époque de fermeture du Japon qui n’avait alors que quelques comptoirs ouverts à la Chine et aux Pays-Bas. Personne n’entrait ni ne sortait.
[5] C’est en forgeant qu’on devient forgeron
[6] 1185-1333
[7] 1868-1912
[8] Quitte ou double, le natto sont graines de soja fermentés qu’on mélange avec sa sauce soja, à la texture gluante, au goût et à l’odeur rivalisant avec nos fromages français, mais tellement nutritif (la traductrice considère que si on aime le camembert ou autre pâte coulante, y a des chances qu’on aime)
[9] Grand radis blanc très présent dans la cuisine japonaise
[10] Zashiki-warashi : esprit d’une maison prenant l’apparence d’un enfant, apportant dit-on la bonne fortune sur le foyer qui l’accueille
~ traduction : Oya’